Skip to main content

Actualité sociale

Ce mois de novembre a une actualité sociale riche.

Projet de loi portant mesures d’urgence relatives au fonctionnement du marché du travail en vue du plein emploi

Le projet de loi portant mesures d’urgence relatives au fonctionnement du marché du travail en vue du plein emploi, autorise le gouvernement à prolonger par décret le régime actuel d’indemnisation chômage (qui devait prendre fin le 1er novembre 2022) jusqu’au 31 décembre 2023 au maximum,  afin de laisser à la réforme de 2019 le temps de produire tous ses effets :

  • Prolongation de la dégressivité des allocations chômage de 30% au bout du 6ème mois pour certains demandeurs d’emploi.
  • Prolongation des règles actuelles de calcul des allocations chômage.
  • Prolongation des conditions actuelles d’affiliation minimum et de la durée d’indemnisation minimale.
  • Prolongation du système de bonus-malus sur les contributions chômage.

Le 25 octobre 2022, le Sénat a adopté en première lecture, avec modification, le projet de loi.

Certaines dispositions du Projet de loi restent en discussion et doivent être soumises à la commission mixte paritaire qui se réunit au cours du mois de novembre. 

Prolongation du dispositif bonus-malus sur les cotisations chômage

Un décret du 29 octobre 2022 prolonge temporairement jusqu’au 31 août 2023 le dispositif bonus-malus sur les contributions patronales d’assurance chômage qui devait, en principe, prendre fin le 31 octobre 2022. 

Rappel :

Le dispositif du bonus-malus concerne les entreprises d’au moins 11 salariés qui relèvent de sept secteurs d’activités qui ont un recours excessif aux contrats courts.

Si une entreprise est concernée, le taux de sa contribution d’assurance chômage peut faire l’objet d’un bonus ou d’un malus, fixé dans la limite d’un plafond et d’un plancher déterminés par secteur d’activité. Le taux de la contribution ne peut pas être porté à un niveau supérieur à 5,05%, ni à un niveau inférieur à 3%.

Rachat des jours de repos

Une questions-réponses du ministère du Travail sur le rachat des jours de repos publié le 27 octobre 2022 répond aux questions les plus courantes concernant ce dispositif.

Rappel :

La loi de finances rectificative pour 2022 permet aux salariés, sur leur demande et avec l’accord de l’employeur, de renoncer à tout ou partie des journées ou demi-journées acquises entre le 1er janvier 2022 et le 31 décembre 2025.

Ce nouveau système de monétisation de jours de repos ouvre droit à des avantages sociaux et fiscaux.

Il est recommandé de formaliser par écrit les échanges entre le salarié l’employeur pour pouvoir la présenter en cas de contrôle du calcul des exonérations sociales.

Le rachat des jours s’applique aux jours acquis en application :

  • D’un accord ou d’une convention collective instituant un dispositif de RTT.
  • D’un dispositif de jours de repos conventionnels. 

Ce dispositif ne s’applique pas aux :

  • Salariés en forfait jours.
  • Aux jours de repos affectés à un compte épargne temps (CET).
  • Aux jours de repos compensateur équivalent venant en remplacement du paiement des heures supplémentaires.
  • Aux jours ou demi-journées de repos soldés de tout compte.

La rémunération du rachat des jours de repos bénéficie :

  • D’une réduction de cotisations salariales instituée pour les heures supplémentaires.
  • D’une déduction forfaitaire des cotisations patronales (1,50 par heure) dans les entreprises employant moins de 20 salariés.
  • D’une exonération d’impôt sur le revenu dans la limite de 7500 euros.

Activité partielle : les critères de vulnérabilité au Covid-19 restent inchangés

La loi de finance rectificative 2022 a prolongé jusqu’au 31 janvier 2023, au plus tard, le dispositif permettant aux salariés vulnérables qui n’ont pas la possibilité de travailler à distance de bénéficier de l’activité partielle et d’indemnités versées au titre de l’activité partielle, fixées à 70 % de la rémunération brute, limitée à 4,5 fois le taux horaire du SMIC (84 % du net).

Un décret du 27 octobre 2022 définit les critères de vulnérabilité permettant d’identifier les personnes vulnérables présentant un risque de développer une forme grave au virus de la Covid-19.

Ces critères restent inchangés et sont au nombre de 3 :

  • Être âgé de 65 ans et plus, présenter des pathologies ou des antécédents de pathologies énumérées par le décret, être sévèrement immunodéprimés.
  • Être affecté à un poste de travail susceptible d’exposition à de fortes densités virales.
  • Ne pouvoir ni recourir totalement au télétravail, ni bénéficier de certaines mesures de protection renforcées sur le lieu de travail.

Report au 1er janvier 2024 du transfert des cotisations Agirc-Arrco

Le transfert à l’Urssaf du recouvrement des cotisations de retraite complémentaire Agirc-Arrco, qui devait intervenir au 1er janvier 2023, est reporté pour toutes les entreprises au 1er janvier 2024.

Pour l’année 2023, les cotisations de retraite complémentaire demeurent donc déclarées et payées auprès de l’Agirc-Arrco.

Frais professionnels : confirmation de l’augmentation de 4% des limites d’exonération de remboursement de repas

Les indemnités de repas versées aux salariés en déplacements professionnels (ou sur chantier) dans le cadre de leurs missions peuvent être exonérées de cotisations sociales dans la limite d’un montant forfaitaire par repas (20,20 € pour l’indemnité de repas du salarié contraint de prendre son repas au restaurant).  

Entretien professionnel

Dans une questions-réponses du 30 septembre dernier sur l’entretien professionnel qu’il a remis à jour, le ministère du Travail a intégré les adaptations qui ont été mises en place pendant la crise sanitaire, notamment la possibilité d’organiser les entretiens par visioconférence et reprend les principales questions reçues concernant les obligations de l’employeur en matière d’entretien professionnel.

Abandon de poste – démission

Le texte tel que rédigé ci-dessous continu son chemin parlementaire. Il lui reste l’étape du conseil Constitutionnel, peut-être l’étape la plus difficile à passer pour ce texte très polémique et particulièrement critiqué par les professionnels des RH.

« Le salarié qui a abandonné volontairement son poste et ne reprend pas le travail après avoir été mise en demeure de justifier son absence et de reprendre son poste, par lettre recommandée ou par lettre remise en main propre contre décharge, dans le délai fixé par l’employeur est présumé avoir démissionné après l’expiration de ce délai ». 

En ce qui concerne la remise en main propre, le ministre du travail devra ne pas oublier d’expliquer la possibilité de remettre en main propre un courrier à une personne absente.

JURISPRUDENCE

Contrat de travail

  • L’existence d’une relation de travail ne dépend ni de la volonté exprimée par les parties ni de la dénomination qu’elles ont donnée à leur convention mais des conditions de fait dans lesquelles est exercée l’activité des travailleurs. Le lien de subordination est caractérisé par l’exécution d’un travail sous l’autorité d’un employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d’en contrôler l’exécution et de sanctionner les manquements de son subordonné (Cass. soc. 16-11-2022 n° 21-17.276 F-D)

La cour de cassation rappelle que le contrat de travail ne se présume pas uniquement sur l’existence d’un document écrit mais aussi par l’existence d’un lien de subordination.

Durée du travail

  • Les associations et entreprises d’aide à domicile peuvent, même lorsqu’elles ne relèvent pas d’un accord collectif autorisant la répartition des horaires de travail sur une période supérieure à la semaine et au plus égale à l’année, ne pas mentionner dans un contrat de travail à temps partiel la répartition de la durée du travail entre les jours de la semaine ou les semaines du mois, dès lors que le contrat mentionne la durée hebdomadaire ou, le cas échéant, mensuelle de travail (Cass. soc. 26-10-2022 n° 20-23.209 F-D).

Pour les entreprise d’aide à domicile, l’obligation de contractualiser le planning des temps partiel n’est pas fondée à partir du moment ou un temps de travail hebdomadaire ou mensuel a été défini.

  • L’arrêté préfectoral, pris en application de l’article L 3132-29, alinéa 1 du Code du travail, qui prévoit la fermeture à la clientèle, une journée par semaine, de tous les magasins d’alimentation ou parties d’établissements sédentaires ou ambulants dans lesquels il est vendu des denrées alimentaires de toute nature au détail, à l’exclusion des commerces de boulangerie, boulangerie-pâtisserie et pâtisserie, ne concerne pas les activités dont les modalités de fonctionnement et de paiement sont automatisées. La cour d’appel, saisie en référé, qui a constaté que, pendant la journée de fermeture prévue par arrêté préfectoral, les magasins fonctionnaient de façon automatique et qu’il n’était pas démontré que les agents de surveillance, qui bénéficiaient d’une dérogation légale à la règle de repos dominical, agissaient en dehors de leurs fonctions afin de participer au fonctionnement du magasin pour son rangement ou l’assistance aux caisses, a pu décider qu’aucun trouble manifestement illicite n’était caractérisé (Cass. soc. 26-10-2022 n° 21-15.142 FS-B).

La cour de cassation rappelle les obligations en matière de repos dominical pour les magasins alimentaires (jusqu’à 13 heures) et les employés des sociétés prestataires de service (sécurité) pouvant elles travailler tout le dimanche mais ne pas intervenir par quelques moyens que ce soit dans la démarche commerciale si le magasin a automatisé sa vente pour éviter la présence d son personnel.

  • Le pouvoir de saisir le juge des référés pour voir ordonner toutes mesures propres à faire cesser l’emploi illicite de salariés en infraction des articles L 3132-3 et L 3132-13 du Code du travail, que l’inspecteur du travail tient de l’article L 3132-31 du même Code, peut s’exercer dans tous les cas où des salariés sont employés de façon illicite un dimanche, peu important qu’il s’agisse de salariés de l’établissement ou d’entreprises de prestation de services. Fait l’exacte application de la loi la cour d’appel qui, ayant retenu que, du fait de la participation des agents de sécurité aux activités du magasin, les modalités de fonctionnement et de paiement n’étaient pas automatisées, a décidé que des salariés étaient employés en violation des règles sur le repos dominical (Cass. soc. 26-10-2022 n° 21-19.075 FS-B).

Dans cet arrêt, qui fait suite au précédent, la cour de cassation confirme que le salarié employé par une entreprise d’un secteur pouvant travailler le dimanche, ne peut exécuter les missions de l’entreprise prestataire mais ne peut intervenir pour des missions normalement assurées par l’entreprise cliente.

Exécution du contrat

  • Les dossiers et fichiers créés par le salarié grâce à l’outil informatique mis à sa disposition par son employeur pour l’exécution de son travail sont présumés, sauf si le salarié les identifie comme étant personnels, avoir un caractère professionnel de sorte que l’employeur peut y avoir accès hors sa présence. Il en résulte que la production en justice de fichiers n’ayant pas été identifiés comme étant personnels par le salarié ne constitue pas un procédé déloyal au sens des articles 9 du Code civil et 6, paragraphe 1, de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales rendant irrecevable ce mode de preuve. Une cour d’appel ne peut pas rejeter des débats les pièces litigieuses, qui proviennent de l’agenda électronique de la salariée, disponible sur son ordinateur professionnel, sans rechercher si ces pièces ont été identifiées comme étant personnelles par leur auteur (Cass. soc. 9-11-2022 n° 20-18.922 F-D).

La cour de cassation confirme que si des fichiers présents sur le matériel informatique de l’entreprise ne sont pas formalisés comme étant personnel, cette dernière y a accès à sa volonté.

  • L’employeur qui, ayant connaissance de divers faits commis par le salarié considérés par lui comme fautifs, choisit de n’en sanctionner que certains, ne peut plus ultérieurement prononcer une nouvelle mesure disciplinaire pour sanctionner les autres faits antérieurs à la première sanction (Cass. soc. 9-11-2022 n° 21-13.224 F-D).

La cour de cassation confirme que si l’employeur à connaissance de plusieurs fautes mais n’en sanctionne qu’une, il ne peut plus sanctionner les autres.

  • Le caractère illicite du motif du licenciement prononcé, même en partie, en raison de l’exercice, par le salarié, de sa liberté d’expression, liberté fondamentale, entraîne à lui seul la nullité du licenciement. Ayant constaté que le licenciement était, en partie, fondé sur le comportement critique du salarié et son refus d’accepter la politique de l’entreprise basée sur le partage de la valeur « fun and pro » mais aussi l’incitation à divers excès, qui participent de sa liberté d’expression et d’opinion, sans qu’un abus dans l’exercice de cette liberté ne soit caractérisé, la cour d’appel ne pouvait pas le débouter de sa demande d’annulation du licenciement (Cass. soc. 9-11-2022 n° 21-15.208 F-D).

Nouvel arrêt sur la liberté d’expression, la cour confirme la liberté d’expression des salariés dans la limite de l’abus.

  • Est nulle la clause d’un contrat de travail par laquelle un salarié s’engage à reverser à son employeur les rémunérations qui lui ont été versées pour des missions pour lesquelles il a été désigné expert personnellement (Cass. soc. 26-10-2022 n° 20-17.105 FS-B).

Aucune clause contractuelle ne peut imposer au salarié de reverser ses rémunérations à l’employeur.

  • Une différence de traitement établie par engagement unilatéral ne peut être pratiquée entre des salariés de la même entreprise et exerçant un travail égal ou de valeur égale, que si elle repose sur des raisons objectives, dont le juge doit contrôler la réalité et la pertinence. Constitue une justification objective et pertinente à une différence de traitement la volonté de l’employeur de réduire les disparités entre des salariés dont les contrats de travail se sont poursuivis sur un site de nettoyage en application de la garantie d’emploi instituée par la convention collective des entreprises de propreté et ceux recrutés postérieurement sur le même site et placés dans une situation identique (Cass. soc. 26-10-2022 n°s 21-10.799 F-D et 21-10.803 F-D).

De par le principe de transfert de chantier (L1224-1), il peut y avoir dans une même société des salaires différents pour un travail égal.

  • Les missions locales pour l’insertion professionnelle et sociale des jeunes constituées sous forme d’association sont des personnes de droit privé gérant un service public. Il s’ensuit que le salarié de droit privé employé par une mission locale pour l’insertion professionnelle et sociale des jeunes, constituée sous forme d’association, et mis à disposition d’une collectivité territoriale, est soumis aux principes de laïcité et de neutralité du service public et dès lors à une obligation de réserve en dehors de l’exercice de ses fonctions, tant en sa qualité de salarié d’une personne de droit privé gérant un service public qu’en celle de salarié mis à disposition d’une collectivité publique. Ne donne pas de base légale à sa décision la cour d’appel ayant jugé nul le licenciement du salarié car discriminatoire pour avoir été prononcé au motif de l’expression par ce dernier de ses opinions politiques et convictions religieuses, alors qu’il résultait de ses constatations que l’intéressé, référent au sein d’une commune pour les missions d’insertion auprès d’un public de jeunes en difficulté scolaire et professionnelle, en grande fragilité sociale, avait publié sur son compte Facebook ouvert à tous, sous son propre nom des commentaires mentionnant « Je refuse de mettre le drapeau … Je ne sacrifierai jamais ma religion, ma foi, pour un drapeau quel qu’il soit », « Prophète ! Rappelle-toi le matin où tu quittas ta famille pour aller placer les croyants à leurs postes de combat », sans rechercher, comme il lui était demandé, si la consultation du compte Facebook du salarié permettait son identification en qualité de conseiller d’insertion sociale et professionnelle affecté au sein de la commune, notamment par les jeunes en difficulté auprès desquels il exerçait ses fonctions, et si, au regard de la virulence des propos litigieux ainsi que de la publicité qui leur était donnée, lesdits propos étaient susceptibles de caractériser un manquement à l’obligation de réserve du salarié en dehors de l’exercice de ses fonctions en tant qu’agent du service public de l’emploi mis à la disposition d’une collectivité territoriale, en sorte que son licenciement était justifié par une exigence professionnelle essentielle et déterminante tenant au manquement à son obligation de réserve (Cass. soc. 19-10-2022 n° 21-12.370 FS-B).

Par cet arrêt, la cour de cassation rappelle que la liberté d’expression existe mais dans la limite d’un droit de réserve ou de loyauté envers son employeur.

  • Dès lors qu’il ressortait de ses constatations que le salarié, dont la mauvaise foi n’était pas alléguée, avait été licencié pour avoir relaté des faits de harcèlement auprès de la société avec laquelle son employeur avait un contrat de location-gérance, la cour d’appel ne pouvait pas le débouter de ses demandes pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et exécution déloyale du contrat de travail (Cass. soc. 19-10-2022 n° 21-19.449 F-D).

En confirmation des différents jugements rendus par la cour, le harcèlement dégage toutes les causes réelles et sérieuses d’un licenciement.

  • Dès lors d’une part qu’il résultait de ses constatations que la lettre de licenciement faisait référence à la lettre par laquelle le salarié avait relaté des agissements de harcèlement moral et d’autre part que la mauvaise foi ne peut résulter de la seule circonstance que les faits dénoncés ne seraient pas établis, la cour d’appel ne pouvait pas débouter l’intéressé de sa demande d’indemnité pour licenciement nul (Cass. soc. 19-10-2022 n° 21-16.361 F-D).

Comme dans le précédent arrêt, dénoncé un harcèlement, même s’il s’avère non fondé, ne peut rendre possible le licenciement du lanceur d’alerte.

Représentation du personnel

  • Les élections partielles se déroulent dans les conditions fixées à l’article L 2314-29 du Code du travail pour pourvoir tous les sièges vacants dans les collèges intéressés, sur la base des dispositions en vigueur lors de l’élection précédente. Le tribunal judiciaire, qui a relevé que le syndicat avait présenté, en vue des élections partielles des membres du CSE de la société, des listes incomplètes composées de quatre hommes et constaté que ces listes comportaient un homme en surnombre au regard de la proportion de femmes et d’hommes figurant dans le protocole d’accord préélectoral établi pour les élections initiales en a déduit à bon droit qu’il convenait d’annuler l’élection du dernier élu du sexe surreprésenté (Cass. soc. 9-11-2022 n° 21-60.183 F-B).

La cour de cassation confirme l’importance primordiale de l’équilibre homme-femme dans les listes de candidats.

  • Le temps passé par les membres de la délégation du personnel au comité social et économique à l’exercice de leur droit d’alerte en cas d’atteinte aux droits des personnes s’impute sur leur crédit d’heures de délégation (Cass. soc. 9-11-2022 n° 21-16.230 F-D).

Jugement très sévère de la cour de cassation qui dit qu’il faut imputer les temps passés par les IRP à alerter sur des atteintes aux droits des personnes sur les heures de délégation.

Paie

  • Inverse la charge de la preuve la cour d’appel qui, pour rejeter la demande en paiement d’un rappel de salaire, retient que le salarié est bien fondé à réclamer l’application de la structure de l’ancien plan de rémunération variable pour la période s’étendant d’avril à décembre 2016 mais que les calculs théoriques proposés par l’intéressé ne tiennent pas compte du décalage des paiements et ne démontrent nullement que l’application de l’ancien plan aurait conduit à une augmentation supérieure de sa rémunération par rapport à celle dont il a déjà bénéficié en raison de l’application du nouveau lequel accélérait grandement le versement des commissions et que le salarié ne peut cumulativement exiger le maintien de l’ancien plan et le bénéfice du nouveau, alors qu’il appartenait à l’employeur de justifier de ce qu’il s’était libéré de son obligation de payer la rémunération variable due au salarié en application de l’ancien plan de rémunération variable pour la période sur laquelle portait la réclamation de l’intéressé (Cass. soc. 16-11-2022 n° 20-23.301 F-D).

Selon la cour de cassation, c’est uniquement à l’employeur de prouver qu’il a exécuté l’ensemble de ses obligations.

  • Une cour d’appel ne saurait débouter les salariés de leur demande en paiement d’indemnités de repas et de cantine en retenant qu’ils ne rapportent pas la preuve qu’ils étaient en déplacement pour les besoins du service durant l’intégralité de chaque période de pause méridienne concernée et ne justifient pas remplir les conditions nécessaires pour bénéficier des indemnités réclamées alors qu’il n’était pas contesté que les salariés techniciens clientèle étaient en déplacement sur la journée dans leur zone habituelle de travail et qu’elle constatait que ceux-ci produisaient les listings établis par leurs employeurs comportant aux dates visées les noms des communes et périodes de leurs interventions ainsi que les annexes à leurs bulletins de paie portant sur « les éléments variables de temps-compte rendu individuel », reprenant pour chaque mois, diverses données dont les heures de début et de fin de service par journée, de sorte qu’il appartenait aux employeurs qui se prétendaient libérés de leur obligation au paiement de l’indemnité de repas de démontrer que les salariés avaient la possibilité de revenir, entre 11 heures et 13 heures, à leur centre de rattachement (Cass. soc. 16-11-2022 n° 21-17.975 F-D).

Jugement dans le même sens que le précédent. La charge de la preuve ne revient qu’à l’employeur.

  • L’ AGS garantit les sommes dues aux salariés à la date du jugement d’ouverture de toute procédure de redressement ou de liquidation judiciaire. Une cour d’appel ne saurait donc décider que l’ AGS n’a pas à garantir les sommes dues à la salariée au titre des rappels de salaire pour la période antérieure au jugement d’ouverture de la procédure de redressement judiciaire du 21 février 2017, alors qu’elle fixait au passif de la liquidation judiciaire une indemnité de requalification des contrats de travail à durée déterminée en contrat à durée indéterminée et une créance de salaires et de congés payés afférents pour une période antérieure au 21 février 2017 (Cass. soc. 9-11-2022 n° 21-10.551 F-D).

La cour confirme que l’AGS garantit les salaires en cas de liquidation même ceux dus avant la liquidation.

  • Il résulte de l’article L 3243-2 du Code du travail que, lorsque l’employeur est condamné au versement d’un rappel de salaire dû sur plusieurs mois, ce rappel peut figurer sur un seul bulletin de paie établi lors de son paiement, pourvu qu’il comporte les mentions prescrites par les articles R 3243-1 et suivants et qu’il indique à quelle période précise se rapporte chacune des créances faisant l’objet d’un versement unique. Après avoir constaté qu’une précédente décision avait ordonné à la société de régulariser la situation de la salariée auprès de l’organisme de retraite des cadres et de lui remettre des bulletins de paie conformes, la cour d’appel a relevé que l’intéressée justifiait que la délivrance à l’occasion de chacun des versements effectués pour régulariser la situation, de deux bulletins de salaire qui cumulaient le montant des salaires dus sur plusieurs années, l’avait empêchée de faire valoir l’intégralité de ses droits auprès de l’organisme de retraite concerné. Elle en a déduit qu’en raison du refus de la société de lui délivrer les éléments permettant un calcul exact de ses droits à la retraite, la salariée avait ainsi subi une perte de chance de percevoir sa retraite de cadre complète et en a souverainement apprécié l’étendue (Cass. soc. 9-11-2022 n° 20-21.856 F-D).

La cour confirme que les rappels de salaire de plusieurs mois peuvent être effectués sur le même bulletin mais que chaque période doit être inscrite sur ce bulletin.

  • L’employeur n’est subrogé dans les droits du salarié aux indemnités journalières de la sécurité sociale que dans les limites des sommes qu’il a effectivement versées à l’intéressé au titre de la garantie de rémunération dont celui-ci bénéficie pendant ses absences pour maladie ou accident. Une cour d’appel ne saurait donc débouter la salariée de sa demande en paiement de certaines sommes au titre du complément de salaire et des congés payés afférents sur son maintien du salaire durant sa période de maladie sans rechercher si l’employeur n’avait pas perçu de la caisse de sécurité sociale et de l’organisme Humanis des indemnités journalières et prestations de prévoyance de la salariée pour un montant supérieur à celui des sommes qu’il avait versées à la salariée dans le cadre de son droit au maintien du salaire (Cass. soc. 9-11-2022 n° 20-22.222 F-D).

La cour confirme que la subrogation et le maintien de salaire ne peut se faire qu’au maximum au salaire du salarié.

Rupture du contrat

  • A privé sa décision de base légale la cour d’appel ayant prononcé la nullité du licenciement économique d’un salarié au motif que son employeur, étant informé de sa demande de reconnaissance de maladie professionnelle et de ce que le médecin du travail était saisi par l’intéressé en vue d’une reprise du travail, disposait, au moment de la notification de la rupture, d’éléments suffisants lui permettant de retenir que l’état de santé du salarié pourrait faire l’objet d’une inaptitude en lien avec l’activité professionnelle, de sorte que le véritable motif du licenciement était lié à l’état de santé du salarié. Elle aurait dû, en effet, rechercher si la cessation d’activité de l’entreprise invoquée ne constituait pas la véritable cause du licenciement (Cass. soc. 26-10-2022 n° 20-17.501 FS-B).

La cour impose aux juges de vérifier, avant de déclarer nul un licenciement économique, si la véritable cause n’est pas la fermeture de l’entreprise avant de rechercher d’autres raisons.

  • Une cour d’appel ne peut pas, pour débouter une salariée, mutée d’une société à une autre, de ses demandes au titre d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse, retenir que son contrat de travail avec la première n’était pas rompu compte tenu de l’existence d’une convention tripartite, formée d’abord par l’acceptation de la demande de la salariée par la deuxième société, qui a pris à sa charge les obligations incombant à l’employeur, puis par l’acceptation de cette mutation par la première société qui a laissé partir l’intéressée sans rompre son contrat de travail, et enfin par l’accord de cette dernière qui a accepté sa mutation, alors qu’elle avait constaté qu’aucune convention tripartite n’avait été signée entre la salariée et ses employeurs successifs organisant la poursuite du même contrat de travail (Cass. soc. 26-10-2022 n° 21-10.495 FS-B).

Une mutation entre société doit faire l’objet d’une convention tripartite faute de quoi le départ de la première entreprise peut être jugée comme un licenciement sans cause réelle et sérieuse.

  • En cas de pluralité de motifs de licenciement, si l’un des griefs reprochés au salarié porte atteinte à une liberté fondamentale, la nullité encourue de la rupture ne dispense pas le juge d’examiner l’ensemble des griefs énoncés, pour en tenir compte, le cas échéant, dans l’évaluation qu’il fait de l’indemnité à allouer au salarié, sans préjudice des dispositions de l’article L 1235-3-1 du Code du travail. Ces dispositions offrent ainsi à l’employeur un moyen de défense au fond sur le montant de l’indemnité à laquelle il peut être condamné, devant être soumis au débat contradictoire. Il en résulte que, lorsque l’employeur le lui demande, le juge examine si les autres motifs invoqués sont fondés et peut, le cas échéant, en tenir compte pour fixer le montant de l’indemnité versée au salarié qui n’est pas réintégré, dans le respect du plancher de 6 mois prévu par le Code du travail (Cass. soc. 19-10-2022 n° 21-15.533 FS-B).

Si la notification de licenciement comporte plusieurs motifs de licenciement, la cour rappelle que les juges doivent étudier chacun d’eux avant de fixer le droit à l’indemnisation.

  • Le remboursement par l’employeur des indemnités de chômage à Pôle emploi ne peut être ordonné par le juge que dans les cas de nullité du licenciement visés à l’article L 1235-4 du Code du travail (Cass. soc. 19-10-2022 n° 21-15.533 FS-B).

Seule la nullité du licenciement peut contraindre l’employeur à rembourser les indemnités de chômage.

  • Les décisions définitives des juridictions pénales statuant au fond sur l’action publique ont au civil autorité absolue en ce qui concerne ce qui a été nécessairement jugé quant à l’existence du fait incriminé, sa qualification et la culpabilité ou l’innocence de ceux auxquels le fait est imputé. L’autorité de la chose jugée au pénal s’étend aux motifs qui sont le soutien nécessaire du chef de dispositif prononçant la décision. Dès lors que la décision de relaxe devenue définitive dont a bénéficié le salarié, poursuivi pour avoir exercé des violences volontaires sur son collègue, était motivée par le fait qu’il n’était pas possible d’apprécier le déroulement exact des faits et l’origine de l’altercation ayant opposé, sur le lieu de travail, l’intéressé à son collègue au cours de laquelle ce dernier avait été blessé, la cour d’appel ne pouvait pas dire le licenciement fondé sur une faute grave (Cass. soc. 9-11-2022 n° 21-17.563 F-D).

En cas de licenciement sur un motif ayant emmené le salarié fautif devant les tribunaux civils et que ceux-ci l’ont reconnu non coupable, cette relaxe fait tomber le motif et rend le licenciement caduc.

  • Un motif tiré de la vie personnelle du salarié ne peut justifier un licenciement disciplinaire que s’il constitue un manquement de l’intéressé à une obligation découlant de son contrat de travail. Sont tirés de la vie personnelle du salarié et ne sont pas susceptibles de constituer un tel manquement les faits de vols de chèques, falsification et usage de chèques falsifiés ou contrefaits au préjudice de son ancien compagnon qui, ayant fait l’objet d’une condamnation pénale définitive, ont été commis en dehors du temps et du lieu de travail et sans que l’intéressé n’utilise les moyens mis à sa disposition par la banque qui l’emploie (Cass. soc. 9-11-2022 n° 20-23.172 F-D).

Les déboires judiciaires du salarié hors contexte professionnel ne peuvent être une source de motivation de son licenciement.

  • Une cour d’appel ne peut pas décider que le salarié n’a pas commis de faute grave en transférant plus de 250 mails professionnels sur sa messagerie personnelle après réception de sa convocation à un entretien préalable au licenciement sans rechercher si l’intéressé établissait que les documents en cause étaient strictement nécessaires à l’exercice des droits de sa défense dans le litige qui l’opposait à son employeur à l’occasion de son licenciement (Cass. soc. 9-11-2022 n° 21-18.577 F-D).

Le transfert de la boite mail (et tout autre fichier par extension) fait par un salarié sous procédure de licenciement peut être considéré comme une faute grave à partir du moment où ce transfert n’était pas nécessaire à sa défense.

Santé et sécurité

  • Lorsque le médecin du travail a mentionné expressément dans son avis d’inaptitude que tout maintien du salarié dans un emploi serait gravement préjudiciable à sa santé ou que l’état de santé du salarié fait obstacle à tout reclassement dans un emploi, l’employeur, qui n’est pas tenu de rechercher un reclassement, n’a pas l’obligation de consulter les représentants du personnel (Cass. soc. 16-11-2022 n° 21-17.255 F-B et n° 21-21.050 F-D).

Confirmation de la position de la cour de cassation. En cas de prononcé de l’inaptitude avec impossibilité de maintien à son poste, l’employeur est libéré de son obligation de rechercher un reclassement et de consulter ses IRP.

  • L’obligation de reclassement qui pèse sur l’employeur préalablement à un licenciement pour inaptitude physique ne s’étend pas à d’autres entreprises qui ne relèvent pas d’un même groupe. Par conséquent, une cour d’appel ne peut pas dire le licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse au motif que l’employeur, qui a pris l’initiative de rechercher des postes auprès de sociétés extérieures au groupe, n’a pas proposé au salarié les postes disponibles au sein de celles-ci et a ainsi manqué de loyauté dans la recherche d’un poste de reclassement (Cass. soc. 16-11-2022 n° 21-12.809 F-D).

L’obligation de reclassement se limite au groupe dans lequel le salarié travaille. Si par volonté de bien faire, l’employeur recherche à l’extérieur du groupe, on ne peut lui reprocher que les sociétés extérieures ne proposent pas au salarié les postes disponibles.

Contrôle – contentieux

  • En matière prud’homale, la procédure étant orale, le requérant est recevable à formuler contradictoirement des demandes additionnelles qui se rattachent aux prétentions originaires, devant le juge lors des débats, ou dans ses dernières conclusions écrites réitérées verbalement à l’audience lorsqu’il est assisté ou représenté par un avocat (Cass. soc. 19-10-2022 n° 21-13.060 FS-B).

Puisque la procédure prud’homale est orale à l’origine, le demandeur peut compléter ses demandes oralement, ou par écrit, lors de l’audience.